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Vers le déremboursement de l’homéopathie ?

publié le 17/10/2018 - Rédigé par Lucile de La Reberdière
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Le débat est presque aussi vieux que l’homéopathie elle-même. Pourtant, il est en train de prendre une tournure sans précédent. Saisie par le ministère de la Santé, la Haute Autorité de Santé va devoir décider s’il est pertinent ou non de rembourser les médicaments homéopathiques en France.


La ministre de la Santé, Agnès Buzyn, l’annonçait avant l’été : « L’homéopathie pourrait rentrer dans le droit commun et être évaluée scientifiquement. Si elle est utile, elle restera remboursée. Si elle est inutile, elle arrêtera de l’être. » Attendu d’ici la fin du mois de février 2019, l’avis sur les médicaments homéopathiques devra prendre en compte « leur efficacité et leurs effets indésirables, leur place dans la stratégie thérapeutique et leur intérêt pour la santé publique ».

Efficacité controversée = patients en danger ?

Voilà une polémique de plus sur l’efficacité de l’homéopathie dont se seraient bien passé les 56 % de Français* qui y ont recours, mais qui n’a pas freiné les 124 médecins, signataires en mars dernier dans Le Figaro d’un brûlot contre les médecines alternatives. Dans cette tribune, ils les estiment dispensées « par des charlatans en tout genre qui recherchent la caution morale du titre de médecin pour faire la promotion de fausses thérapies à l’efficacité illusoire ». Des accusations graves, auxquelles le Syndicat national des médecins homéopathes n’a pas manqué de répondre en déposant plainte.
Rappelons que l’homéopathie est pratiquée par des médecins au cursus médical similaire à celui des allopathes, qui se sont ensuite spécialisés en homéopathie. On notera que les facultés de médecine de Lille et d’Angers ont déjà annoncé, à la rentrée 2018, avoir supprimé leur diplôme d’homéopathie.
Au-delà de l’opposition, c’est le danger pour les patients qui est pointé. Mais sans alternative de soin, le déremboursement de l’homéopathie contraindrait ces derniers à se tourner vers les médicaments chimiques.

Des pétitions contre la stigmatisation

Un tiers des Français utilisent aujourd’hui l’homéopathie pour soigner asthme, eczéma, rhume, otite, prostatite, règles douloureuses, dépression, troubles du sommeil, anxiété… En 2017, les ventes d’homéopathie en France se sont élevées à près de 620 millions d’euros, d’après le cabinet OpenHealth.
Le déremboursement prendrait en otage des centaines de milliers de patients, sans compter l’aberration économique : classés en « service médical rendu modéré » et marqués d’une étiquette bleue, les tubes de granules homéopathique sont actuellement bien moins remboursés par l’Assurance maladie (donc coûtent bien moins cher à l’État) que les antibiotiques ou anti-inflammatoires non stéroïdiens – l’abyssal « trou » de la Sécu aurait donc tout à y gagner.
Des pétitions, qui ont déjà réuni plus de 36 000 signatures, circulent sur Internet pour éviter d’en arriver aux modèles anglo-saxons. Aux États-Unis, les fabricants de produits homéopathiques sont tenus de mentionner que leur efficacité n’est pas « scientifiquement prouvée ». En Angleterre, l’homéopathie n’est plus prise en charge depuis fin 2017.


* Enquête Ipsos réalisée en 2012.


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